Éric Brogniet, Toi que j’aime, in Possibles, n° 7, avril 2016

Éric Brogniet, Toi que j’aime
extrait d’Ulysse, errant dans l’ébloui, Le Taillis Pré, 2009

Je parle une langue étrangère / Que bien peu sont capables d’entendre.
Éric Brogniet, À la table de Sade, Le Taillis Pré, 2012

couv. BrognietToi que j’aime, que j’ai aimée, qui est au-delà, à telle hauteur
Indicible : Reste ! Sois ! Demeure !
Veille avec la blessure !
Veille avec ton corps et veille avec ton cœur
Et ta peur et ma peur !

Veille pour que le monde ne soit pas sans lueur
Entre la mémoire et la catastrophe!
Quel chemin nous reste ouvert ?
Il ne m’importe pas : seuls demeurent
Ceux qui ont avoué leurs douleurs !

Et cela, si pauvre, avec le souci de l’autre
Et de l’irréductible humanité
Que nous aurons tant bafouée
Par nos reniements, nos peurs
Quand tout manque et que l’avenir se dérobe

Quand nous pensons à nos irrémédiables fractures
Quand on nous vole, quand il nous vient que n’ayant été
Nous espérons et ne maîtrisons plus rien et que nous pleurons
O toi que je meurs de connaître

Éric Brogniet, Ulysse, errant dans l’ébloui, Le Taillis Pré, 2009 [avec l’aimable autorisation de l’auteur
et de l’éditeur qui s’entrient sur Recours au poème avec Lucien Noullez]

« Ulysse n’est plus ici l’individu enfermé dans une situation de guerre, de conflit, ou d’exil, il est l’homme des « grands cataclysmes intérieurs ». Son obstacle n’est plus tant extérieur qu’en lui ; c’est de ses propres déchirures qu’il souffre, de son incapacité à adhérer à sa vie, et la violence qu’il évoque est l’oppression d’un mal-être d’autant plus impossible à surmonter qu’il n’offre aucune prise. Échoué et sans repères dans une existence dont il ne comprend guère le sens, il est le survivant d’un naufrage intérieur… » Extrait de l’étude de Myriam Wathée-Delmotte, pour Autre Sud, n° 39.

Éric Brogniet, La terre d’utopie —>

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